Le TyA-Rennes organise sa prochaine Conversation le vendredi 10 mars 2023, de 14h à 17h (accueil dès 13h30) à l’Auditorium de la Maison des Associations à Rennes, sous le titre « Puissance des addictions, Pouvoir de la parole ».
À partir de situations cliniques, nous mettrons cette thématique au travail, en compagnie de Myriam Chérel, psychanalyste, membre de l’École de la Cause freudienne et de l’Association Mondiale de Psychanalyse.
Argument
L’écoute et la parole connaissent aujourd’hui un véritable engouement. Disponible en ligne, 24h/24 « Comme s’il s’agissait d’écouter la plainte des sujets qui demandent de l’aide, alors qu’il s’agit d’en faire quelque chose [1]», les plateformes d’écoute, se sont développées à la manière des services de streaming. Les formations elles-aussi se multiplient, dans le champ social, éducatif, pédagogique et bien au-delà, dans le counseling et le monde de l’entreprise. C’est à ce point que l’écoute « sert à tout » souligne Éric Laurent, y compris « à faire des amalgames entre des thérapies centrées sur la rééducation, et la psychanalyse qui s’appuie sur le sujet de l’inconscient [2]». Si l’écoute s’est largement démocratisée depuis la découverte freudienne, les sujets sont-ils pour autant mieux entendus ?
Paradoxalement, les sujets addicts semblent pourtant faire exception, voire même obstacle à ces promesses contemporaines. Branchés sur les objets de la pulsion produits par la société de marché et fréquemment contrariés par la parole, ils sont souvent dits « dans le déni », quand de leur objet ils ne veulent/peuvent pas parler. Bien loin d’une satisfaction, ils conduisent alors à une certaine frustration pour celui qui les écoute, voire à un certain découragement. Que faire alors de l’écoute quand on a l’impression de « ne servir à rien » ? Que faire à contrario de ce que nous écoutons, quand les sujets ne parlent que de ça ? La clinique des mono symptômes crée des catégories : « Je suis alcoolique », « Je suis toxicomane » et conduit à des identifications où le sujet est réduit à l’objet qu’il consomme et qui le consume. Faut-il tout écouter, et pour quoi faire ?
La puissance des addictions face au pouvoir de la parole implique d’emblée une certaine « modestie [3] » dans son accueil et son possible traitement. Bien des sujets ne sont rencontrés que lorsqu’une limite réelle a été franchie dans le corps, à l’occasion d’une hospitalisation, d’une incarcération, d’un accident, voire d’une maladie. La croyance dans le pouvoir de la parole n’apparaît souvent pas au départ sur le devant de la scène. Comment opérer lorsqu’un sujet ne se plaint pas, et quand l’objet de l’addiction semble saturer toute parole, toute demande d’aide à priori ?
Lacan invitant les psychanalystes en 1977 à ne pas reculer devant la psychose, il s’agit de faire le pari aujourd’hui de ne pas reculer devant l’écoute des sujets addicts, car la fonction de la drogue comme remède possible aux maux de l’existence, n’est-elle pas d’abord en lien étroit avec ce qui du langage a pourtant marqué un sujet jusque dans son corps ? N’est-elle pas, même sous la forme du « court-circuit [4]», en lien direct avec le rapport que le sujet entretient avec la parole elle-même ? N’est-elle pas un traitement, si radical soit-il, de la parole ?
Par quels préalables, quelles opérations, la parole peut-elle alors devenir, un traitement de substitution viable et permettre de rivaliser avec l’illimité de l’addiction ? Comment manœuvrer dans l’écoute avec les sujets addicts aujourd’hui, et comment y répondre au cas par cas ? En partant de situations cliniques rencontrées dans la pratique au quotidien, c’est ce que nous vous proposons de mettre au travail avec Myriam Chérel, psychanalyste, membre de l’ECF et de l’AMP, lors de cette 17ème conversation du TyA à Rennes.
[1] Laurent E., « L’interprétation : de l’écoute à l’écrit », la Cause du Désir, n°108, juillet 2021, p.58.
[2] Ibid.
[3] Miller J.A., « Clôture », Le toxicomane et ses thérapeutes, Analytica, Paris Navarin, 1989, p.132.
[4] Ibid., p.133.
Informations
Maison des Associations, Auditorium, 6, cours des Alliés, 35000, Rennes France
Tarif plein : 18 € / Réduit : 10 € pour les étudiants et les demandeurs d’emploi.
Le nombre de places étant limité, il est conseillé de s’inscrire rapidement.